Le Bistronomique
- Jean-Marie

- 4 oct. 2020
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 3 janv. 2021
Quelle idée saugrenue que le Bistronomique !
Envisager menu en art gastronomique
En un lieu manosquin a priori quelconque
Voire même presqu'anodin alors que le quiconque
Qui prend le risque fou de s'y assoir un soir
Se rend au rendez-vous du savoir émouvoir.
Quelques amuse-bouche, il faut rester poli,
Se dressent, s'assoient, se couchent, s'exposent bien polis,
Et présentent aux papilles du fondant, du craquant ;
Quelques miettes s'éparpillent quand s'opère le croquant.
Feuilleté feuille de chêne et brioche fumée
Deux trois bouchées s'enchaînent pour plaisir de gourmets...

C'est alors que l'entrée - mais n'est-ce pas le hors d'œuvre -
Savamment orchestrée et prompte à la manœuvre,
Fait son apparition. L'assiette fait le chapeau
Offrant présentation d'un guill’ret gaspacho,
Tomates et croustillant, copeaux de parmesan
Anis émoustillant, fin de bouche apaisant !

Vermentino - ou rolle - domine en son cépage...
Nous buvons les paroles bien avant le breuvage
Du sommelier cordial, joyeux maître d'hôtel
Qui sur un ton jovial promet l'émotionnel
Dans le mariage des mets avec ses vins d'ici.
Nous n'savons rien des mets mais ferons-nous comme si ?
Nous nous en remettons à ses alliances de robe
Il n'est point marmiton et ses mots nous enrobent !
Je m'égare, je m'égare et pendant ce temps-là
Sans vraiment crier gare est arrivé l'foie gras !
L'enserrant comme une peau, pistaches en couverture
Autour comme en copeaux, bouts d'figues en confiture !
Que dire du mariage entre le vert du vin
Vermentino cépage et le quasi divin
D'un fondant capiteux ? Un mariage de raison
Qui se fit lumineux dans son exhalaison !

« Il faut tenir distance » me dit Florence en rire
« Aurai-je la résistance d’arriver à finir ? »
« C’est une course de fond, un rythme à se donner »
Répondis-je bouffon « comme pour la randonnée !... »
Mais déjà les couverts reconstituent la table
Donnant ainsi l’feu vert à la suite redoutable !
Et cette suite fut thon ! Thon rouge mariné
Tomates en capiton ! Sous la langue le cru nait
Sous la dent c’est le cuit, l’extérieur est saisi
Et l’intérieur biscuit… Concours en jalousie
Entre deux rouges mets allongés côte à côte
Offrant goût en sommet et cherchant le sans-faute !

Après chang'ment d'couverts, une tranche de volupté !
Une base potagère pour ce fin velouté
Butternut et marrons, émulsion au fumet
Libérant les lardons et l'envie de Gamay !
"Cet aromate qu'est-ce ? M'enquis-je un peu curieux "
"C'est de l'astina cress répondit tout joyeux
Le garçon au service, ces petites feuilles en cœur
Avec leur goût d'anis apportent de la douceur
Et des touches réglisse, c'est un secret du chef "
Quelles nouvelles épices pour qu'en suite derechef
Nous restions étonnés par d’autres assemblages
Concoctés, mitonnés en subtil fignolage ?
Sur quelle note en frisson ? Sur quel poivre et quelles baies ?
Le suivant des poissons ne fut pas le barbet.

Entre temps va sans dire que not’e bel échanson
Afin d’nous attendrir suggéra en boisson
Une syrah de grenache made in Haute Provence
Un rouge plein de panache en belle redevance
Finissant sur des notes de mûres mûres automnales
Annonçant l’idée lotte, voire même le sardinal !
Sur un lit d’épinards une purée pomme de terre
Offre refuge au bar posé comme par mystère
Sur une couche champignon qui lui serre de hamac !
Coupé à l’estagnon – non ce n’est pas un big mac ! –
Et coiffé de dentelle, ce fut une joie des yeux
Avant que d’être celle de nos palais curieux !

La syrah, le grenache s’éprirent d’un carignan
Et se montrèrent bravaches : « des tanins pas faignants »
Nous dit l’maître d’hôtel « qui iront guillerets
Conter monts et merveilles à la suite en filet ! »
La suite fut révélée en même temps que les verres
Une suite sans faux filet puisque le vrai de chair
En deux morceaux choisis trônait en apogée
Sur une sauce en lit où venaient se loger
Garniture millefeuillée, lamelles pommes-de-terre
Courgettes comme effeuillées, après la mer la terre,
Qui ont eu privilège, dans le beurre clarifié,
De cuire en florilège et d’aller sanctifier
Le saignant d’équilibre de la pièce maîtresse
Qui en moelleuses fibres nous transmit sa tendresse.
Vous excuserez ici la distraction de l'auteur qui, tout entier consacré à son plaisir, en a oublié le cliché...
Mais qui dit apogée sait déjà que déclin
Vers prochaine périgée entame le chemin…
Fromage, aurait-il place entre l’idée repu
Qui ne laisse guère de place et l’idée « j’en peux plus »
Dictée par l’abdomen alors que les bruits courent
Qu’est très grand le domaine de celui qui concourt
Pour les prix pâtissiers, le chef Monsieur Grein Pierre
Qu’il nous faut apprécier ses délices sorbetières !

S’il est de la passion le fruit est chemin d’croix !
Et combien de stations avant qu’il nous l’octroie ?
En meringue évidée, goutte d’eau dessinée
Le chef a eu l’idée d’induire du confiné
Pour une boule sorbet de fruits de la passion,
Et autres petites baies, présentant tentation
Tant pour le contenant que pour le contenu
Tant pour le surprenant que pour le bienvenu !
Les mots manquent de nuances tant il est périlleux
De décrire en fragrances les alliages gouteux...

Jean-Marie Giraud
Villemus le 4 octobre 2020
Et pour déguster ces mets :
Le Bistronomique Manosque Pierre Grein
180 Avenue Régis Ryckebusch,
04100 Manosque
04 92 72 41 86





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