top of page

Mains pour demain

  • Photo du rédacteur: Jean-Marie
    Jean-Marie
  • 3 mars
  • 6 min de lecture

Dernière mise à jour : 18 mars







Je tiens le présent dans une main et dans l’autre : le futur. Pourtant j’ai passé mon temps les bras ballants en position debout ou les bras croisés en position assise. J’ai passé ma vie bras ballants bras croisés pour éviter les heurts, les bon  comme les mal. Tenant l’un et l’autre dans chaque main, quand je joins ces dernières ce ne peut être qu’entre minuit et zéro heure. Pas d’heure, pas d’heurt, je vous le disais : ni bon heurt ni mal heurt !

 

Un jour pourtant il a fallu les déballer, les décroiser pour que soit la main d’œuvre ! Il fallut ne plus en avoir deux gauches et oublier la maladresse, autrement dit déménager pour en trouver une bonne qui soit vraie qui soit simple, sans avoir à dire bis sans avoir à dire ter . Pour ce faire je dus monter en haut du mât et observer l’horizon en me préparant à tout moment à dire : terre ! Mais revenons aux temps de l’indicatif…

 

En applaudissant des deux mains, je risque de transformer un sinistre présent en un radieux futur ou bien au contraire, de transformer un présent plein d’adresse en un futur funeste ! En tout cas, c’est sûr, le futur a besoin d’un coup de main ! Il rêve, il me l’a dit, demain faire dans le velours, demain faire des jolies choses de ses dix doigts comme de construire des marionnettes avec de la ficelle et du papier… Elles sont jolies mes marionnettes, même si, ce jour quand même, elles sont un peu désuètes !

 

Demain tenant c’est le présent en participe. Demain tenu c’est un pari tenu en principe. Demain tiendra si c’est futur, demain tiendrait conditionnel. Demain plume en main, et sans remettre ce demain à mon surlendemain, j’écrirai à son père, Maître es qualité, pour lui demander sa main. En futur je serai son promis, c’est promis je serai son futur et nous marcherons main dans la main, deux lendemains tendus vers un même sombre horizon ! Elle doit être ma fiancée même si je sais de source sûr et par des milieux bien informés par Voici ou Gala, qu’elle ne serait pas de première main ! Mais je suis un homme bon qui cherche sans heurt à faire le bonheur tant du père que de sa fille. Vous pensez le père est Maître, tout à la fois Notaire, Huissier, Avocat, Magistrat, Député, ex Sénateur, Président Honoraire j’en passe et de beaucoup plus sévères ! De plus il serait philologue possédant quelques bons mots et des milliers d’hectares !

 

Ce projet, écrire au Maître est à portée de main et je vais le mettre en œuvre dès demain en choisissant la dextre pour écrire au Maître et la senestre pour dessiner un cœur tremblant et maladroit destiné à Marguerite. Mon sens des traditions me dit que je vais accomplir cette mission haut la main ! Ni une ni deux et avant que demain soit et sans procrastiner, je me mis à écrire ma demande avec la plus grande sincérité qui soit, soit sans flagornerie, et je n’y suis pas allé de main morte !

 

« Maître, Ô grand Maître d’Orient ! Cher Maître et cher père de ma promise,

 

Je sais marguerite entre de bonnes mains, les vôtres qui sont au bout de vos bras ! Bras robuste, qui comme celui de Don Diègue le père de Rodrigue a sauvé si souvent cet empire capitatilisco-mafiosi et qui admirés par tout un peuple aussi ibérique soit-ile. Je sais Marguerite entre de bonnes mains et pourtant, c’est le cœur débordant de gratitude que je prends la plume maintenant de la dextre et le pinceau maintenu de la gauche !

 

J’ai ouï dire qu'en un tournemain vous fûtes propulsé au sommet, vous asseyant dans un fauteuil présidentiel, dans un bureau clés en main muni de toutes les dernières avancées technologiques : téléphone kit mains libres, prises automatiques des dossiers avec transmission de mains en mains et remise en mains propres, sous main en crocodile du Nil, caméra cachée lisant les jeu des concurrents pour avoir toujours la bonne main au Poker et les dix de der à la belote !

 

Vous, Ô Grand Maître d’Occident ! Qui vous êtes façonné à la main et moulé à la louche tel votre glorieux ancêtre Guillaume le Conquérant, vous qui êtes allé à main droite et à main gauche, à hue et à dia pour ne pas trop laisser d’onces à la concurrence, vous qui vous êtes, malgré ses digressions, toujours repositionné à l’extrême centre, vous qui vous êtes battu à mains nues contre les dragons du Bolchévisme en faisant patte blanche aux apprentis fascistes, je vous enjoins d’entendre ma demande ! Je demande la main de votre fille, je demande la main de Marguerite !

 

Je me vois comme son futur, je la vois comme ma promise, comme ma soumise. Elle saura épiler à ma demande les deux longs poils qui ornent le centre de mes paumes, elle saura exonérer de toutes taxes sa dot en me la passant de la main à la main avec votre bénédiction et vos liquidités Ô grand Maître en recels d’abus de biens sociaux ! Je me vois comme un chevalier gris ne lui forçant la main en rien sauf à vous plaire quand vos avis divergent. Je me vois comme votre homme de main, votre main armée contre les dérives islamo-gauchistes, wokisantes et dépravées des senestres de l’hémicycle. Je lui prêterai main forte, contre remboursement bien sûr, demain et aussi le lendemain du lendemain jusqu’à ce qu’elle porte le fruit de mon engeance et l’ainé de vos héritiers mâles !

 

Je saurai me montrer digne de vous Ô Maître en exploitant quantité de petites mains qui sauront assembler les plus beaux atours pour tenter de cacher les rondeurs disgracieuses de votre fille unique. Maître, je ne sollicite pas un mariage de la main gauche tel ceux perpétrés par les incroyants et les mécréants et qui pullulent depuis des décennies freinant considérablement le maintien des naissances chez les premiers de corvée. Je souhaite picorer dans votre main et dans la sienne dévorer l'héritage jusqu'à la lie, jusqu’à ce que la mort nous sépare ! Enfin je souhaite, tout comme vous l’avez fait, faire mainmorte sur vos vassaux et vos serfs afin de m’ériger tout comme vous en symbole agissant pas la force et des propos ulcérants.

 

Maître Ô grand Maître des horloges, je sais que le temps passe trop vite et que, montre en main, il est presque demain quand je trace ces mots qui sont là pour vous plaire. Mais je vois que j’allai oublier l’essentiel Grand Maître du Septentrion, je n’arrive pas les mains vides. Mes demains sont emplis de promesses factices, de rêves dépravés, et de bassesses indignes ! Je suis exactement comme vous quand vous étiez jeune : misérable, incapable, oisif, pédant, faussaire, méprisant, hautain, profiteur, veule, misogyne, pleutre mais…Ambitieux. Ma main droite ne sait pas ce que fait ma senestre et ma main gauche ignore tout des actions de la dextre. Comme vous le fîtes, Maître Ô grand Maître du Méridien, je mets mes mains en porte-voix pour vous dire l’admiration sans bornes que je vous porte et vous exprimer toute la gratitude qui est la mienne pour l’exemple que vous avez donné, que vous m’avez donné ! Je sais que vous me laisserez les mains libres pour faire ou ne pas faire le bonheur de Marguerite car ce n’est pas cela qui compte pour vous en premier lieu mais de la savoir entre de bonnes mains. Entre de bonnes mains, je le sais maintenant, que je vous connais mieux, c’est de continuer à avoir la mainmise sur votre fille en pouvant la soustraire à ses propres désirs et volontés, c’est d’avoir la main leste à défaut de les avoir toujours nettes même si, bien entendu et cela est tout à votre honneur, il convient de ne pas avoir de sang sur les dites mains quand bien même ce sang semble, encore aujourd’hui et certainement demain, quelque peu impur ! Je sais que cette missive sera apprécié de vous Ô grand Maître et qu'à l'unanimité de votre vote à main levée, elle sera élue et Marguerite sera mon élue !

 

Cette demande, la demande de la main de Marguerite, vous sera remise en mains propres par un fourbe de mes amis qui donnerait sa main à couper contre la promesse d’un petit strapontin ou d’une petite récompense…

 

Je vous prie de croire, Grand Maître, en l’expression de mes respectueuses salutations. »

 

Sans doute vous demanderez-vous ce que fait Boulgakov dans la demande en mariage ? Je me le demande aussi. En insomnie d’hier, quand était le passé simple des yeux ouverts dans l’obscurité, je me suis amusé, sans beaucoup d’aide-mémoire, en dehors des méandres synaptiques, à chercher les expressions contenant le mot main et les mots qui avaient en eux la consonance main. Le matin en lever tôt et avant d’aller réaliser les Rognons au Madère d'une main experte pour le compte de L’Aparenthèse à Corps, j’ai pu écrire les première lignes. Ce soir, avant que demain prenne le relais d’aujourd’hui j’ai pu finir la mouture. Je m’aperçois, aidé du Robert, que peu de mots commencent par main… Maintenant bien sûr, et maintenir avec toute sa conjugaison et ses dérivés… C’est donc plutôt mince !

 

Je ne sais pas qui est le Grand Maître imaginé mais, en relisant ma prose ci-dessus, il me fait penser à de drôles de mélanges très actuels de chefs européens, tsaristes ou étasuniens ! Je vous rassure, je ne suis pas le personnage qui écrit la demande en mariage… Je suis un peu trop vieux pour convoler en noces arrangées !


Jean-Marie Giraud,

Aubessagne, le 2 mars 2025


Comentários


Abonnez-vous
  • Facebook - White Circle
bottom of page